La souveraineté par l’emmurement
Michaël Neuman
La thèse du renouveau de la souveraineté des Etats connaît une mode incontestable au sein de discours généraux prompts à valider l’hypothèse d’une rétractation de l’espace de travail offert aux organisations humanitaires.
A cette aune, la lecture de « Murs » de Wendy Brown éclaire les tensions entre déclin de souveraineté et les efforts de mise en scène fournis par les Etats pour la réaffirmer. Empruntant à la philosophie politique et aux sciences politiques autant qu’à la psychologie, l’essayiste américaine émet l’hypothèse selon laquelle « affaiblie par des forces rivales, la souveraineté de l’Etat-nation, ou ce qu’il en reste, va affirmer son caractère théologique, non plus passivement mais ouvertement et agressivement ». Ainsi, la prolifération de barrières politiques, des Etats-Unis à Israël, du Zimbabwe au Yémen, en passant par les mécanismes de protection des frontières extérieures de l’Union européenne incarnerait moins « l’expression résurgente de la souveraineté de l’Etat-nation dans la modernité tardive que des images de son échec ». La contagion de fortifications à laquelle on assiste pourrait en fait être comprise comme un symptôme de la crise de la souveraineté politique dans la globalisation, bien davantage que comme un révélateur de son exacerbation.
Dans sa livraison de début juin, « La vie des idées » offre une très éclairante note de lecture du paradoxe ainsi offert par « Murs, les murs de séparation et le déclin de la souveraineté étatique ».
Wendy Brown, « Murs. Les Murs de séparation et le déclin de la souveraineté étatique », Les prairies ordinaires, 2009, 206 p, 15€
Pour citer ce contenu :
Michaël Neuman, « La souveraineté par l’emmurement », 14 juin 2010, URL : https://msf-crash.org/fr/blog/acteurs-et-pratiques-humanitaires/la-souverainete-par-lemmurement
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