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Entretien

Le management chez MSF – Partie 2

Portrait of Marion Péchayre
Marion
Péchayre

MSF-Crash : Coordinatrice de l'équipe

Anthropologue de l'action humanitaire. Avant de faire de la recherche, Marion Péchayre a travaillé en tant que responsable et coordinatrice de programmes sur le terrain puis au siège de Solidarités International. Elle a un doctorat en Development Studies (SOAS University of London) et un Master en Management international (ESCP Europe). Elle enseigne à PSIA et au Humanitarian and Conflict Response Institute (HCRI). Ses principales publications sont : "Politics, Rhetoric, and Practice of Humanitarian Action in Pakistan" (dans "The Golden Fleece: Manipulation and Independence in Humanitarian Action" Kumarian Press, 2012) et  "Impartialité et Pratiques de Triage En Milieu Humanitaire. Le Cas de Médecins Sans Frontières Au Pakistan" (dans "La Médecine Du Tri. Histoire, Éthique, Anthropologie" PUF, 2014).

Elba Rahmouni
Elba
Rahmouni

Chargée de diffusion au CRASH depuis avril 2018, Elba est diplômée d’un master recherche en histoire de la philosophie classique et d’un master professionnel en conseil éditorial et gestion des connaissances numériques. Lors de ses études, elle a travaillé sur des questions de philosophie morale et s’est intéressée notamment à la nécessité pratique et à l’interdiction morale, juridique et politique du mensonge chez Kant.  

Dans un premier entretien, Marion Péchayre évoquait différents problèmes relatifs au management chez Médecins Sans Frontières : travail en silo, multiplication des outils de gestion dans une perspective de contrôle, omniprésence des demandes de validation, effacement du rôle des individus au profit d’une présentation pseudo scientifique des faits et des projets, etc. Dans cette interview, réalisée par Elba Rahmouni, il est cette fois question des solutions à apporter à ces différents problèmes, autant d’hypothèses pour améliorer nos façons de travailler. Marion Péchayre n’entend pas donner des recettes toute faites mais plutôt un état d’esprit empreint de « sagesse pratique » (un concept de sociologie des professions) et de management par la délibération que chacun, et chaque équipe, pourra mettre en œuvre à sa manière.  

0. Remarque préliminaire

Dans notre premier entretien, tu disais vouloir modifier nos manières de travailler plutôt que notre structure, peux-tu préciser pourquoi ? 

Ces dernières années, les dirigeants de MSF se sont beaucoup intéressés à la modification de notre structure : réforme destinée à redonner du pouvoir aux responsables opérationnels du département des opérations, création de nouveaux départements (département achats et approvisionnement en 2014), clarification des niveaux de responsabilité et encouragement à plus d’autonomie. Malgré ces initiatives, la difficulté du travail en silo n’a fait que s’accentuer depuis les années 1990. Du coup, je me suis dit qu’il fallait peut-être commencer par réfléchir à nos façons de travailler au sens large, avant de s’attaquer à des réformes d’organigrammes. 

En discutant avec les participants d’une session du FOOTLa Formation Opérationnelle Orientée Terrain est la formation à destination des cadres opérationnels., du personnel international comme du personnel national, issus du siège et du terrain, je me suis rendue compte que la plupart d’entre eux ne souhaitaient pas d’une nouvelle réforme de structure leur accordant plus d’autonomie. Ils craignaient qu’une « décentralisation » les laisse encore plus seuls pour exercer leurs responsabilités. En revanche, la plupart souhaitaient être davantage consultés sur les orientations stratégiques de leurs projets et soutenus pour faire face à leurs difficultés. Ainsi, c’était moins l’organigramme en tant que tel qui leur posait problème que les relations de travail quotidiennes entre départements et avec le siège. 

1. La sagesse pratique

Tu parles d’« adapter notre management à la spécificité de notre travail humanitaire ». Qu’y a-t-il de spécifique à notre travail ? 

Le cœur de notre travail est de déployer des soins médicaux (parfois dans l’urgence) dans des pays à ressources limitées, dans des situations dynamiques, souvent volatiles. C’est un travail marqué par un haut degré d’incertitude, comparable à de nombreux égards au travail médical. 

Des recherches en sociologie sur les professions médicales montrent que les médecins ne s’appuient pas uniquement sur un raisonnement scientifique lorsqu’ils doivent faire des choix thérapeutiques, pour adapter la prise en charge à chaque patient et à chaque situation de soins. Si la connaissance scientifique est un prérequis aux soins, chaque soignant y adjoint son expérience pratique ainsi que, le cas échéant, des échanges avec ses pairs. Le sociologue Florent Champy appelle « sagesse pratique » cette forme de rationalité qui mobilise autant les connaissances théoriques (science), les savoirs pratiques (guidelines, procédures) que l’expérience professionnelle : la sienne et celle de ses pairs. Dans cette logique, la décision médicale s’apparente à un pari sur les objectifs de soins (soulager, guérir, prévenir, rassurer…) et sur les moyens thérapeutiques. Un pari dont on ne peut, par définition, pas garantir le résultat à 100%. 

Les acteurs de l’aide sont dans une situation comparable. Dans chaque situation où nous intervenons, il y a une part d’incertitude sur les buts de l’action (qui aider en priorité par exemple), sur les moyens à mettre en œuvre et sur les résultats de l’action ; notamment parce que nous ne pouvons pas anticiper comment les patients, les autorités et nos collègues vont réagir. Nos décisions, nos choix, sont des paris, que nous devons réévaluer et justifier en permanence. Si la maîtrise de connaissances et de savoir-faire techno-scientifiques (notamment médicaux) est essentielle, elle n’est pas tout. La capacité à convoquer nos expériences passées, à réfléchir par induction (qu’est-ce qui est comparable, différent des situations antérieures), par intuition, est tout aussi importante. 

Or nous vivons dans un monde qui survalorise la rationalité scientifique. Lorsque nous prenons des décisions, ce sont en général les arguments d’apparence scientifique qui sont mis en avant, le plus souvent quantitatifs. Les décisions y apparaissent souvent comme la seule option possible, occultant ainsi la part d’incertitude et le fait que nous avons toujours le choix. 

Le problème, lorsque l’on rend la part d’expérience et le jugement professionnel invisibles dans le travail, c’est de se priver de la mise en discussion collective, de la confrontation de cette expérience à d’autres expériences, celles des collègues. Le danger de ne pas voir que nos décisions tiennent plus du pari informé que de la conclusion scientifique logique, c’est de croire que nos décisions sont définitives, qu’elles sont « les bonnes », et qu’elles doivent être poursuivies coûte que coûte. 

2. Le management par la délibération

En quoi consistent les espaces de délibération ? 

La délibération est l’un des moyens de faire en sorte que nos paris opérationnels soient le plus éclairés et le moins risqués possible. C’est aussi une manière de gérer l’écart irréductible entre ce qui est « prescrit » par l’organisation (les procédures, les normes, etc.) et le « réel » du travail (les procédures doivent parfois être adaptées, les normes ne peuvent pas toujours être respectées, des imprévus surgissent, etc.). Les espaces de délibération permettent de discuter de ces écarts et de la façon de les gérer. Tout ce qui peut se passer de manière routinière, comme prévu et sans gêner les autres n’a peut-être pas besoin d’être discuté ; mais le reste, l’inhabituel, le problématique, doit au contraire l’être. Et les réunions doivent être essentiellement dédiées à cela, plus qu’à un rendu de comptes détaillant ce que l’on a fait et qui peut être consigné à l’écrit quelque part pour une meilleure coordination. 

Les désaccords professionnels entre collègues ont toute leur place au sein de ces espaces de délibération car c’est précisément à partir des divergences (de leur explicitation, de leur mise en discussion) que de nouvelles règles temporaires peuvent émerger. Il ne s’agit pas de chercher le consensus à tout prix, mais d’entendre une pluralité de points de vue et d’arguments venant nourrir un arbitrage fait par le responsable d’équipe ou celui qui a amené la question à ses collègues. Cette approche permet de décider collectivement de s’écarter de certaines règles, sans pour autant laisser le champ libre à chacun de décider de nouvelles règles tout seul dans son coin. 

Ce que le management par la délibération n’est pas :

  • Une révolution. Discuter les expériences et les avis professionnels, prendre des décisions dans l’incertitude, sont des pratiques qui existent déjà. Mais il serait bien de leur donner plus de valeur et d’y consacrer plus de temps.
     
  • Encore des réunions. Il ne s’agit pas nécessairement de rajouter des réunions mais de transformer le contenu de celles qui existent. Aujourd’hui, les réunions d’équipe sont souvent des moments de rendu de comptes et de coordination en vue de tenir un planning. Dans les espaces de délibération, les équipes s’attèlent à discuter des difficultés et plus spécifiquement de l’écart entre ce qui était prévu ou ce que dit le protocole (le travail prescrit) et ce qui se passe en réalité (le travail réel). 
     
  • La fin des objectifs. On peut distinguer management par objectifs et management par la délibération, pour autant le management par la délibération ne signifie pas la disparition des objectifs qui sont nécessaires pour établir une direction commune et nous organiser. Mais dans le management par la délibération, les objectifs ne sont pas tout ce dont on parle, les discussions sont guidées par ce qui résiste à nos plans, quitte à rediscuter des objectifs et parfois les ajuster. 
     
  • L’anarchie. Si parfois les règles et les procédures doivent être adaptées, il ne s’agit pas pour autant de laisser chacun décider d’agir comme il l’entend : c’est la discussion collective, avec ses collègues de travail ou ses pairs, qui régule l’écart à la règle. Un individu qui souhaite s’écarter de la règle doit soumettre son idée à la discussion pour que ses collègues évaluent du point de vue de leur fonction la possibilité et les risques associés, et partagent ainsi la responsabilité de ne pas respecter la procédure.

3. Le principe de subsidiarité 

Qui doit décider ? Faut-il aller vers moins de centralisation ? 

Aujourd’hui, il me semble que l’enjeu est moins celui de la centralisation ou de la décentralisation de la décision que celui de la coproduction, ou de l’association de plusieurs personnes aux discussions qui précèdent un arbitrage. Différents espaces de délibération doivent exister : d’une part au même niveau hiérarchique entre différentes fonctions et d’autre part entre niveaux hiérarchiques (terrain, capitale, siège).

Selon le principe de subsidiarité, il convient de refuser de prendre une décision que quelqu’un à un niveau inférieur pourrait prendre. Cette définition rapide ne permet pas toujours à une personne de savoir ce qui relève de sa responsabilité ou pas. Je pense que c’est une fausse piste que de penser qu’un guide, aussi exhaustif soit-il, pourrait être une réponse à cette difficulté. Je pense qu’il il est nécessaire d’avoir quelques grandes règles écrites sur les responsabilités de chacun (validation annuelle d’un budget par projet, responsabilités relatives aux procédures d’achat etc.) afin d’avoir un cadre clair et simple. Mais pour le reste, on doit pouvoir réguler au fur et à mesure en consultant son supérieur ou ses collègues, en leur demandant d’abord leur avis et non leur validation. Il me semble que cette pratique permettrait de mieux comprendre les contraintes de ses collègues, décloisonnerait le travail et in fine amènerait à construire ensemble des décisions. 

4. La voix de tous ou la voix des plus forts

Le management par la délibération, est-ce une manière de décider qui inclut le plus de personnes possibles ou, au contraire, s’agit-il d’un système qui encourage et légitime les individus les plus performants dans la maîtrise de l’expression et de l’argumentation ? 

Je préfère une organisation qui valorise des pratiques de confrontation d’idées et de points de vue, qu’une organisation qui encourage les individus à respecter et faire respecter des règles. 

Ceci étant, donner son avis est une action par laquelle on s’expose, c’est une prise de risque (celui d’être en désaccord avec les autres) qui n’est pas toujours évidente. Il faut donc du temps à chacun pour trouver ses marques au sein d’une équipe, connaître les autres suffisamment et savoir comment exprimer son point de vue. Si ces espaces existent en routine, cela permet de s’entraîner, de s’habituer à discuter. 

A mon avis, il est important que les managers partagent leurs doutes, ne se posent pas en autorité-qui-sait, et donnent l’exemple en présentant leur choix non comme des vérités mais comme des hypothèses. MSF devra aussi proposer des formes d’accompagnement pour permettre à tous ses membres de développer leurs capacités d’argumentation (par des formations ou du mentoring).  

5. Satisfaction individuelle et mission sociale

Cette manière de travailler a-t-elle pour objet de rendre le travail plus satisfaisant du point de vue des individus ou de mieux accomplir notre mission sociale ? 

Nous nous sommes intéressés aux façons de travailler car nous remarquions une certaine rigidité bureaucratique ralentissant et alourdissant notre travail. Cela s’accompagnait de plaintes et de frustrations à différents niveaux : les responsables opérationnels trouvaient que les « fonctions supports » endossaient plus un rôle de contrôle que de soutien ; et, en parallèle, les départements supports se plaignaient de ne pas être suffisamment considérés et inclus dans les discussions portant sur les choix opérationnels. 

Plusieurs travaux de rechercheMathieu Detchessahar, ‘Faire Face Aux Risques Psycho-Sociaux: Quelques Éléments d’un Management Par La Discussion’, Négociations, no. 1 (2013): 57–80; Christophe Dejours, Le Choix: Souffrir Au Travail n’est Pas Une Fatalité (Bayard Paris, 2015); Yves Clot, Travail et pouvoir d’agir, Travail humain (Paris: PUF, 2008).ont montré que les espaces de délibération permettaient non seulement de prévenir certaines frictions dues au manque de consultation préalable (et d’éviter la charge de travail associée à leur gestion), mais surtout de redonner prise à chacun sur le sens de son travail, dans la mesure où tous les avis comptent. 

On pourrait penser que le management par la délibération est trop chronophage par rapport à la nécessité d’agir rapidement dans la conduite de nos opérations. D’abord, il ne s’agit évidemment pas de discuter de tout. Ensuite, à mon avis, le temps passé à discuter des problèmes s’avère en réalité moindre par rapport à celui passé à résoudre des difficultés engendrées par le manque de discussion. Selon le psychiatre et psychologue du travail Christophe Dejours, nous vivons dans une société malade de la surcharge de travail. Il affirme qu’une partie de cette surcharge peut être directement attribuée à la fragmentation du travail, notamment lorsque chacun doit passer un temps considérable à reconstituer des informations que d’autres personnes possèdent.   

Notre hypothèse (peut-être naïve et qu’il faudrait tester) est donc que le management par la délibération améliorera à la fois la satisfaction des personnes et l’efficacité globale de l’organisation.  

6. Les managers 

Comment s’y prend le « bon » manager pour mettre en place un management par la délibération ?

Le manager ou responsable d’équipe a un rôle essentiel. Il doit d’abord être capable de repérer les sujets importants à discuter en équipe, tels que les « conflits de normes » entre départements, et d’autres difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des activités. Pour ce faire, il faut qu’il s’intéresse au travail quotidien, réel, des membres de son équipe, et aux problèmes rencontrés par chacun : pourvoir un poste aux conditions de rémunération fixées par les grilles de salaire parfois déconnectées du marché de l’emploi, suivre une recommandation du département médical qui s’écarte des politiques nationales ou nécessitant des moyens supplémentaires, renvoyer en temps et en heure la comptabilité ou les statistiques médicales malgré des désagréments informatiques, respecter des injonctions contradictoires comme diminuer la  surface d’exposition à l’insécurité  tout en  préservant la qualité médicale, etc. 

Contrairement au monde de l’entreprise où il est fréquent que les « professionnels du management » méconnaissent le travail réel des salariés, les responsables MSF connaissent en général le métier des personnes qu’ils encadrent. Ils l’ont souvent exercé auparavant, comme logisticien, administrateur, soignant, responsable d’activité, coordinateur de terrain… En revanche, ils ne connaissent pas toujours le travail réel des collègues d’autres départements. Je pense qu’il faudrait les encourager à affiner leur connaissance du « travail humanitaire » dans toutes ses dimensions, quitte à faire des « micro-stages » avec des collègues occupant d’autres fonctions (par exemple, que le coordinateur médical passe plusieurs jours avec le coordinateur de Ressources humaines qui lui explique les enjeux et contrainte de sa fonction – et vice versa). 

Dans le management par la délibération, le manager doit prêter une attention particulière au travail de formalisation. La formalisation permet de :

  • S’assurer que l’on s’est bien compris à l’oral. Après une réunion, il est utile d’écrire aux participants pour s’assurer que tout le monde est d’accord sur ce qui a été dit ; cela ne va pas toujours de soi. 
     
  • Continuer à réfléchir. L’épreuve de l’écrit pousse à la précision des idées. Parfois, c’est en écrivant qu’on se rend compte que certains raisonnements ne sont pas si évidents qu’ils ne paraissent ou pas suffisamment étayés. 
     
  • Rendre disponibles les informations au-delà du cercle des personnes qui ont participé. Une fois transcrites à l’écrit, les discussions peuvent être archivées et diffusées à toutes les personnes susceptibles d’être intéressées. 
     
  • Garder une trace pour l’avenir. Si l’on considère que nos décisions sont des paris, et non des bonnes décisions qui s’imposeraient d’elles-mêmes, alors nous devons observer ce qu’elles produisent et parfois les ajuster. Cela requiert de nouvelles discussions pour lesquelles il est intéressant (voire nécessaire) de repartir de ce qui a déjà été dit. Avoir une trace du passé permettant de réévaluer est donc très important. 

7. L’institution 

Qu’est-ce qui a été fait dans la maison pour développer le management par la délibération ?

Les aspects concrets de cette approche ont été développés dans le cadre de la révision de notre formation au management d’équipe. Nous avons renommé le FMT (Field Management Training) en WoW (Ways of Working), dorénavant ancré dans cette réflexion autocritique sur nos pratiques. Une nouvelle politique de « Learning & Development » pour les salariés de MSF France a vu le jour et ses manifestations concrètes commencent à émerger. Par exemple le changement de format du bilan individuel de fin de mission, s’intéresse à ce que les individus ont réalisé et appris, vérifie qu’ils se sont intéressés aux contraintes de travail de leurs collègues et des membres de leurs équipes, plutôt que de juger, de manière normative, leur niveau de compétence dans une série de domaines. 

Lorsque nous présentons cette approche, en formation notamment, je sens que, globalement, elle séduit les gens. Certains ne nous ont d’ailleurs heureusement pas attendus pour travailler de la sorte, et j’espère que cela leur donnera des arguments pour faire valoir leur vision auprès de leurs collègues et chefs au besoin. 

Par exemple, plusieurs personnes impliquées dans la réponse à l’épidémie de Covid-19 en Île-de-France me racontaient à quel point la dynamique d’équipe du projet avait été enthousiasmante malgré tous les obstacles rencontrés, justement parce qu’ils avaient mis en place des moments de discussion quotidiens pour partager leurs questions, leur inconfort, pour exprimer parfois leurs désaccords et in fine affiner ce qu’ils étaient en train de faire. En les écoutant, je me disais qu’ils semblaient comme soudés par ces échanges, par la construction au jour le jour d’un récit commun autour de l’objectif d’aider les personnes les plus en marge du système en France. Dans ce cas, l’équipe a su compenser l’effet pervers du travail en silo. En revanche, plusieurs d’entre eux ont noté à quel point des espaces de discussion avec les niveaux hiérarchiques supérieurs avaient manqué, faisant de la fragmentation verticale une entrave à la qualité de leur travail. 

Tout responsable d’équipe peut mettre en place une telle approche à son niveau avec son équipe indépendamment de ce qui se passe au niveau hiérarchique supérieur, et c’est d’ailleurs l’occasion pour les individus d’influencer les décisions, voire même de marquer de leur empreinte certains projets. Pour autant, le seul moyen d’institutionnaliser cette pratique serait qu’elle soit adoptée à tous les niveaux afin que les responsables d’équipe donnent l’exemple, y compris au plus haut niveau de l’organisation.

8. Pour conclure… 

Personnellement, ce travail de réflexion m’a donné envie de me confronter à nouveau directement au travail de terrain avec les équipes, c’est pourquoi je repars en mission pour deux ans en espérant mettre à l’épreuve cette approche du management par la délibération, et en la prenant comme une hypothèse sur la meilleure façon de travailler et dont les résultats doivent être observés et surtout discutés.

Pour citer ce contenu :
Marion Péchayre, Elba Rahmouni, « Le management chez MSF – Partie 2 », 20 juillet 2020, URL : https://msf-crash.org/fr/blog/acteurs-et-pratiques-humanitaires/le-management-chez-msf-partie-2

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Commentaires

Michael

Ou peut on trouver la première partie?

Merci

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