L’universalisme libéral a-t-il vécu ?
Michaël Neuman
Les débats sur les interventions humanitaires agitent en permanence le landernau de la gauche intellectuelle du Nord Est des Etats-Unis, tiraillée entre son opposition à l’impérialisme et sa dévotion à la défense des droits de l’homme. Car les progressistes interventionnistes apprécient peu la régularité avec laquelle leurs adversaires leur rappellent leur rapprochement objectif avec les néoconservateurs. Les débats actuels ont pour l’origine ce qui apparait à certains comme les revirements du président Obama. Alors qu’il était apparu pendant la campagne présidentielle prompt à encourager, y compris par la force, la « responsabilité de protéger », son hésitation à confirmer ses dispositions une fois aux affaires a semé le trouble parmi certains de ses supporters.
C’est sur le site Internet de la revue « The New Republic », organe historique des milieux progressistes américains, que certaines des dernières discussions ont eu lieu, confrontant partisans et opposants de l’interventionnisme étasunien.
Pour les premiers, la non-intervention laisse la place libre aux atrocités commises de par le monde. Pour les seconds, c’est bien d’abord sur les conséquences des interventions humanitaires qu’il faut se pencher. Assumant sa conversion, David Rieff explique ainsi qu’il fut un adepte de la tradition interventionniste jusqu’au moment du conflit au Kosovo. De l’Irak au Darfour, explique-t-il, il n’a cessé d’être convaincu « des limites de notre compréhension de ce lieux dans lequel nous interviendrions. » Pour sa défense d’un interventionnisme raisonné, Richard Just lui oppose qu’à l’image de l’intervention au Kosovo, ou de celle qu’il a pu appeler de ses vœux au Darfour, il s’agit moins de s’interroger sur les conséquences d’une intervention que sur la gravité des conséquences en l’absence de celle-ci. Il en appelle également à écouter les voix des victimes, celles auxquelles les critiques de l’interventionnisme « semblent accorder bien peu de poids ».
C’est à David Rieff que revient le mot de la fin. Soutenant que la distinction entre oppresseurs et oppressés est souvent bien moins claire que ce que les interventionnistes libéraux voudraient croire, il rappelle le « primum non nocere » d’Hippocrate et souligne avec force les désordres causés par les expériences du passé.
LES CONTRIBUTIONS EVOQUEES ICI SONT A CONSULTER SUR LE SITE DE THE NEW REPUBLIC
Pour citer ce contenu :
Michaël Neuman, « L’universalisme libéral a-t-il vécu ? », 26 juillet 2010, URL : https://msf-crash.org/fr/blog/droits-et-justice/luniversalisme-liberal-t-il-vecu
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