Rwandan Refugees in Congo
Brève

Ecoutez le podcast « Prises de parole publiques de MSF : auprès des réfugiés rwandais, traqués et massacrés au Zaïre-Congo en 1996-1997 »

Le « podcast sur les prises de parole publiques de MSF : auprès des réfugiés rwandais, traqués au Zaïre-Congo en 1996-1997 » raconte les événements, défis, dilemmes et controverses auxquels les équipes MSF ont été confrontées : MSF pouvait-elle extrapoler publiquement sur les conditions sanitaires des réfugiés alors que l’accès à ces derniers lui était depuis peu interdit ? Réalisant que ses équipes étaient utilisées comme appât pour attirer puis massacrer les réfugiés, MSF devait-elle cesser ses activités et condamner publiquement cette instrumentalisation ?

Ce podcast disponible en anglais et français a été réalisé en collaboration avec MSF Royaume Uni et MSF France et adapté à partir de l’étude de cas sur les prises de parole publiques : « Traque et massacres des réfugiés Rwandais au Zaïre-Congo : 1996-1997 ».

Cette série de 8 épisodes examine l’expérience de MSF confrontée aux conséquences du génocide des Rwandais tutsi en 1994, et en particulier à son impact sur les populations locales et les populations réfugiées au Zaïre (aujourd’hui République démocratique du Congo).

A travers les communiqués de presse, les rapports internes, les articles de presse de cette époque, ainsi que les récits des membres de MSF témoins des événements, le podcast raconte les efforts de MSF pour faire connaître les situations auxquelles ses équipes étaient confrontées. Il éclaire également les dilemmes, contraintes et controverses auxquels elles devaient faire face.

MSF pouvait-elle extrapoler publiquement sur les conditions sanitaires des réfugiés alors que l’accès à ces derniers lui était depuis peu interdit ?

La guerre éclate entre le Rwanda et le Zaïre. La plupart des réfugiés sont des civils qui ont fui le Rwanda lorsque le Front patriotique rwandais a pris le pouvoir après le génocide des Rwandais tutsi, en 1994.

Alors que les troupes du nouveau pouvoir rwandais, alliées à celles de l’Alliance des forces démocratiques pour la défense du Congo (ADFL) attaquent les camps de réfugiés et que l’instabilité s’accroît dans l’est du Zaïre, MSF et les autres organisations humanitaires finissent par perdre en partie l’accès à la région et aux réfugiés. MSF craint alors que des milliers de ces réfugiés ne meurent dans les camps ou dans leur fuite, en raison des réserves de nourriture dangereusement basses et de la rareté des soins médicaux.

Pour renforcer son appel à pouvoir accéder et apporter de l’aide aux réfugiés, MSF publie un communiqué de presse intitulé « 13 600 morts sont-elles insignifiantes ? ». Ce chiffre est une extrapolation basée sur la mortalité enregistrée lors des premières semaines des déplacements forcés de ces populations.

Cette extrapolation publique se retourne contre MSF qui doit alors répondre aux critiques des médias qui nient les massacres de réfugiés rwandais commis par les troupes du nouveau pouvoir en place à Kigali et de la rébellion Zaïroise. L'une des critiques lancées contre MSF et d'autres organisations est qu’elles exagèrent l’ampleur de la crise afin de récolter des fonds.

En réponse à ces critiques, le directeur de la communication de MSF France déclare dans un quotidien français : « Peut-être avions-nous tort d’avoir raison trop tôt ? Même si l’on doit le manipuler avec précaution, le pronostic constitue un des impératifs de l’exercice médical. Il est une condition absolument nécessaire à la mise en œuvre d’une politique de prévention. »

Cette controverse amène les équipes à se questionner : est-ce que MSF peut et doit communiquer sur le sort des réfugiés alors qu’elle n’a pas en permanence un accès direct à ces derniers ? Peut-elle alors extrapoler sur la condition présumée des réfugiés et de leurs besoins en assistance médicale ?

Réalisant que ses équipes étaient utilisées comme appât pour attirer puis massacrer les réfugiés, MSF devait-elle cesser ses activités et condamner publiquement cette instrumentalisation ?

Les équipes MSF sur le terrain découvrent de plus en plus de preuves que les réfugiés sont massacrés par l'Alliance et ses alliés rwandais. Elles commencent aussi à réaliser qu'un dilemme encore plus grave est en train de se poser en raison de leur présence dans le Kivu : les équipes humanitaires sont elles-mêmes parfois utilisées par les forces de l'Alliance pour attirer les réfugiés et les massacrer.

Le coordinateur de l'équipe intersection d’urgence de MSF au Sud-Kivu se souvient : « On se rendait à un endroit, on identifiait les réfugiés, on rentrait à la base de Bukavu. Le lendemain quand on essayait d'y retourner, il y avait des problèmes de sécurité et on ne nous autorisait pas à y retourner. Les militaires nous arrêtaient et nous ne retrouvions plus jamais ce groupe de réfugiés, alors on a commencé à devenir très, très méfiants. »

Ce dilemme suscite d’intenses débats au sein de MSF : l’association doit-elle cesser ses activités dans la région ? Ou bien doit-elle les poursuivre tout en condamnant cette instrumentalisation, dans l'espoir d'empêcher ces massacres ? Mais agissant ainsi, ne prend-elle pas le risque de mettre en danger ses équipes, les réfugiés et les autres opérations en cours dans la région ?

Ecouter le podcast

Pour en savoir plus sur les études de cas sur les prises de paroles publiques de Médecins Sans Frontières :

Pour citer ce contenu :
Laurence Binet, « Ecoutez le podcast « Prises de parole publiques de MSF : auprès des réfugiés rwandais, traqués et massacrés au Zaïre-Congo en 1996-1997 » », 5 janvier 2023, URL : https://msf-crash.org/fr/blog/acteurs-et-pratiques-humanitaires/ecoutez-le-podcast-prises-de-parole-publiques-de-msf-aupres

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